Quand je ne sais pas quoi faire,
je m'assois à ma table
et je regarde mon grille-pain,
j'aime bien regarder mon grille-pain,
en fait c'est pas mon grille-pain,
c'est juste un grille-pain,
un simple grille-pain que j'ai récupéré,
mais c'est quand même un grille-pain,
un vrai grille-pain,
un grille-pain qui dore un peu le pain si on coupe une tranche de pain dans le sens de la largeur et si on la dispose convenablement entre les grilles en veillant à ce que le mie du pain ne déborde pas pour ne pas brûler et si on presse avec l'index ou le pouce ou l'index et le majeur - ce qui est un cas assez courant, en tous cas plus courant qu'on ne pense en général - sur la manette jusqu'à la buté pour enclencher automaticement le mécanisme qui chauffe le pain et le grille petit à petit jusqu'à ce qu'un autre mécanisme, beaucoup plus sec et violent, le fasse remonter et le libère ainsi tout doré encore tout chaud tout brûlant,
tout grillé par le grille-pain,
par mon grille-pain,
même si c'est pas mon grille-pain,
même si j'ai pas de grille-pain,
et même pas un grille-pain que j'aurais récupéré,
ou qu'on m'aurait refilé,
ou que j'aurais trouvé,
par hasard,
dans la rue,
ou dans une gare,
au coin d'un hameau, à l'angle d'une rue,
dont j'aurais hérité,
qui me serait revenu,
que j'aurais retrouvé,
comme ça,
par hasard,
ou que j'aurais trouvé comme ça,
comme un grille-pain,
exactement comme on trouve un grille-pain,
parce que je n'ai pas de grille-pain,
et parce que j'ai plein de choses à faire,
j'ai tellement de choses à faire que j'oublie que j'ai un grille-pain,
un vrai grille-pain,
un vrai grille-pain qui n'existe pas,
mais qui grille quand même le pain,
qui grille le pain quand on le met dedans,
qui le grille,
qui le grille vraiment comme du pain,
comme du pain qu'on mettrait dans un grille-pain,
dans un vrai grille-pain qui n'existe pas,
mais que je regarde
quand je n'ai rien à faire.